Fort Libéria

 

 

 

 

Le fort Liberia a été construit au XVIIe siècle, sous Louis XIV, à l'initiative de Vauban, sur la commune de Villefranche de Conflent. Il fut construit en à peine sept ans, plus précisément de 1680 à 1687, puis a été remanié au XIXe siècle sous Napoléon III. En 1659 est signé le traité des Pyrénées, délimitant les frontières entre la France et l'Espagne. Le château est situé entre trois vallées : la Rotja le Cady et la vallée de la Têt. Vauban écrit: <<(...) Pour attaquer ce fort, il faudra que l'ennemi fasse monter du canon 3 ou 4 fois aussi haut que les tours de Notre Dame par des rampes aussi droites que des toits de maisons. Après quoi si on me demande ce qu'il en fera, je réponds : rien, attendu qu'il ne pourra voir les flancs (de la muraille) et que son fossé étant profond de 4 à 5 toises coupé dans le roc vif dont le bord du fossé casematé est couvert par ses bords, il n'y a d'autre partie à prendre que d'en approcher pour se loger sur le bord et se donner après la patience de le combler pierre par pierre jusqu'à ce qu'il soit entièrement plein. Voilà tout le remède que je sais et quand je serais payé des ennemis pour leur donner un bon avis là-dessus, je ne pourrai pas leur en donner d'autre. Ainsi, il est sans difficulté que le moindre mal qui puisse arriver à l'ennemi qui assiégera cette place est d'y échouer ou du moins d'y employer un si grand temps que quelque petite que fût une armée, il faudrait qu'elle y périt faute de bois et de fourrage ce pays en étant entièrement dénué."

 

Le Fort possède trois niveaux : le plus bas est à 601m d'altitude, au milieu il atteint les 610m, et le plus haut à 616m. Le plan de ce fort est organisé en arrêtes de poisson, car le relief ne permettait pas d'adopter le plan en étoile caractéristique des fortifications de Vauban. Le château était placé au dessus de Villefranche, de façon à surveiller la ville et à voir si les Espagnols essayaient de les attaquer. La construction du fort était prévue par Vauban dès 1669 mais il faut attendre 1680 pour que les travaux commencent. La ville et le fort font de Villefranche une véritable place-forte qui protège l'entrée du Roussillon et aide Mont-Louis dans la défense de la vallée.

Plan du Fort Libéria réalisé par la direction du fort

La caserne des soldats

Caserne des sous-officiers surmontant la panetterie

Une caserne est située au deuxième niveau, elle était habitée par des soldats. Ils se relayaient, utilisant la méthode des lits chauds. Il s'agit d'utiliser le même lit pour trois soldats qui alternent repas, repos, et rondes. Ainsi le fort pouvait contenir que quelques lits, pour un nombre trois fois supérieur de soldats.Les soldats devaient eux-mêmes apporter leur nourriture, à l'exception de l'eau et du pain, c'est pourquoi une boulangerie a été construite au troisième niveau, ainsi qu'une citerne de 70 000L, et une autre de secours située dans une cour, pouvant contenir 5000L d'eau. Au total le fort peut loger 108 soldats.

La partie la plus fragile et la plus visible du fort est située au troisième et dernier niveau. Elle va bénéficier d'un traitement particulier : les fortifications sont constituées par un épais et haut mur de défense. La caserne des sous-officiers est également au troisième niveau du fort. On remarque sa toîture en ardoises et ses menuiseries peintes du premier étage avec du sang de bœuf. (On utilisait du sang de boeuf car le coût était réduit et ce type de peinture protège le bois des insectes xylophages). Au rez de chaussée, se trouve la boulangerie.

Vue de la prison du fort

Dans le sous-sol de la partie haute du fort se trouve la prison. En 1680 les empoisonneuses y ont été enfermées à la suite de l'affaire des poisons qui toucha l'entourage de Madame de Montespan, maîtresse de Louis XIV. Deux d'entre elles y sont restées emprisonnées 36 et 43 ans.

Les courtines (éléments de remparts situés entre deux tours) sont bâties en marbre rose et en briques rouges dans leurs parties supérieures pour éviter que des éclats causés par l'impact des balles sur le marbre ne blessent les soldats. Les balustrades du chemin de ronde sont en fer forgé catalan.

 

Elément de balustrade en fer forgé catalan

 

Partie supérieure du rempart en brique

Dans les galeries de contre-escarpe, se situent 3 magasins à poudre. Un soldat y était enfermé pendant une période de 24 à 48 heures derrière des doubles portes. La fabrication de la poudre implique des vapeurs dangereuses (mélange de charbon, de salpêtre et de souffre). De fines ouvertures étaient placées en haut des couloirs afin de permettre au soldat de respirer sans s'intoxiquer.

 

 

 

 

 

 

Au 19eme siècle (entre 1850 et 1856), Napoléon III apporte des modifications au fort, telles que la construction d'un pont-levis, d'une seconde entrée et d'un souterrain de 775 marches reliant la forteresse à la ville, surnommé "L'escalier aux mille marches"

 

Galerie de contre escarpe

 

Escalier reliant le fort à la ville

Le fort devient privé en 1927 quand M.Laurens l'achète. C'est à lui que l'on doit le nom de Fort Libéria, en hommage à la cité qui s'appelait à l'origine Villa Libéria. Il souhaite en faire une maison de retraite pour marins, mais le projet n'aboutit pas. M. Puy le rachète en 1957, pour l'offrir à sa fiancée en cadeau de mariage. Il le cède par bail emphytéotique (de 99 ans) à quatre commerçants de Villefranche. Ils le restaurent et le fort ouvre au public en 1987. En juin 2008, il bénéficie d'une mesure d'inscription au titre des monuments historiques. En juillet de la même année il est, avec le village, classé au patrimoine mondial de l'UNESCO.